Silence de mots

Publié le par Lolou

Il est des moments dans la vie où on avance sans se poser de questions, et d'autres où on a l'impression de marcher en pointillés voire à reculons. Il y a les moments où on a besoin de faire un bilan et ceux où on souhaite fermer nos yeux et nos oreilles et devenir robot pour ne plus rien ressentir. Mais toute notre vie n'est qu'un errement de l'un à l'autre de ces points. Pour le moment je suis dans la bonne phase, celle où j'avance, croisant les doigts dans mes paumes fermées pour que cela continue, refusant de penser que cela prendra fin un jour, avant de revenir, comme  cela l'a toujours fait. Profiter, instant présent, continuer tout droit, pas de stress, pas besoin, regarde le chemin t'est tracé, tu vas au bout et tu sauras, même si quelques doutes demeurent. Regarde derrière, il y a tant de choses que tu as surmontées, à présent respire, ouvre tes poumons, gonfle tes joues et hurle ton amour de la vie. Cette vie que tu as souhaité, que tu as cherché, cette vie que tu as à présent, délestée de quelques uns et gonflée de quelques autres, avec des défauts et des bons côtés, des larmes et des rires. Et pourtant un sourire, une réserve, ne pas trop en dire pour ne pas ennuyer mais en dire assez pour intéresser, sans entrer dans le confidentiel mais en laissant paraître un peu de notre vie personnelle, sembler à l'aise en public, sans jamais l'être, faire semblant, "aller bien"... Tout ça n'est pas bien difficile, un peu d'exercice et n'importe qui en serait capable. Tout le monde peut sembler, peu de gens savent être. Être vraiment, voilà ce qui doit ressortir d'une personne, d'un individu, toute son individualité doit transpirer de ce qu'il dit. Être ou ne pas être... La deuxième solution est bien tentante, la première si difficile. Pas pour tout le monde, c'est sûr, bien qu'être soit toujours compliqué. Le Je, comment l'exprimer, qu'en exprimer... Nombre de fois je pense "il faudra que je raconte ça et ça et ça" à unetelle (qui est souvent Dear ou/et Lélé), à peu près autant de fois j'oublie de le raconter et ne me le rappelle qu'une ou deux heures après les avoir quittées. Ou bien la mémoire me revient en une mauvaise occasion. Un sujet non adapté, qui n'intéresserait personne. C'est arrivé si souvent que la peur de ces moments me hante. Mais c'est idiot, cela arrive tout le temps à tout le monde. Idiot, toujours, pour à peu près tout ce que je fais concernant les relations sociales.


C'est sûrement pour ça que je suis entrée en Communication, qui plus est en Ressources Humaines. En fait ce n'est pas tant l'avenir que mon avenir qui m'intéresse. Pas tant la vie que ce que j'en ferai, de mon point de vue et pas de celui de la société. La paradoxalité fait encore son oeuvre, quand bien même ce mot n'existerait pas. Solitude et compagnie, lecture et conversation, amitié et haine, calme et colère, rire jaune et franc. Impossibles à distinguer les uns des autres, car tous cohabitent en même temps dans mon être. Un être de robot, de mécanique, un esprit qui marche mais rien d'autre. Rien qu'une putain de machine qui suit le chemin de cette pourrie de société, les moeurs de cette population moutonne, sans arriver à y répondre ou à y faire quoi que ce soit. La morale? Rien qu'un idéal. Seuls les héros, ceux qui attirent les foules avant ou après leur action, ceux qui agissent, qui osent, ceux qui s'opposent et se dressent quand les circonstances l'exigent. Ceux qui savent et que l'on suit si l'on a un peu de coeur et de couilles. Ceux qu'on admire avec des étoiles dans les yeux, qu'on aimerait tant remplacer, ceux dont on voudrait être proches. Ceux que j'envie quand bien même ils ne le souhaitent peut-être pas. Ceux qui rendent le monde si beau par leur existence, et si noir par la nôtre en comparaison.


Ne pas réfléchir, se laisser porter. Ou couler. Avancer tout droit, regarder les deux chemins, faire "au feeling". Sourire, rire, comme si tout cela n'avait aucune importance. Ca n'en a pas en fait, ce n'est que ma vie, peu importante, sans conséquences. Petite fourmi dans le grand cycle de la vie. Petite jeune fille qui tente de parler devant une classe et bafouille, fait rire par de petits mots pour faire passer la gêne, donne l'impression d'une fausse humilité à certain(e)s et donc pêche par un semblant d'orgueil. Pourtant je n'ai cherché que l'honnêteté, ce que ceux qui comptent ont bien vu. Le sentiment d'être apprécié, qu'on ne nous en veut pas, qu'on ne nous trouve pas idiot, inutile, orgueilleux, cherchant l'attention, mais simplement humain, gentil, plutôt intelligent... C'est toujours plaisant. Même si ça ne touche qu'en certaines occasions. Je ne sais plus trop ce que je dis, de toute façon tout ce charabia n'intéresse pas grand monde. Mais on écrit toujours pour être lu. Un jour mon cahier arrivera peut-être entre les mains de quelqu'un. Je ne le souhaite pas, mais une toute petite partie de moi l'attend. J'ai hâte d'avoir écrit ma nouvelle, pour le moment j'ai peur d'avoir mal. Ecrire est douloureux, toujours. C'est le moment où le vide de ma vie m'apparaît entièrement, où tout le talent qu'on me prête disparaît dans le néant de mon histoire, où j'aligne des mots vides devant mes yeux larmoyants, rageuse de mon manque de style, déprimée de ces phrases bateau, jusqu'à ce qu'on me lise sans que je m'y attende et qu'on me dise que c'est bien, ce que je prends comme "pas mal". Ca vient de la famille, dans mon esprit c'est donc forcément déformé. Mais il ne faut pas dire ça, c'est pénible pour les autres. Comme bon nombre de mes pensées. Il ne faut pas le dire, il faut le garder et l'effacer, parce que les autres ne veulent pas entendre ça. Il faut fermer les yeux et les oreilles et sourire, parler d'autre chose. Et avancer, porté par le courant, tant qu'il va dans le bon sens, sans oublier de regarder la direction pour avoir le temps de nager à contre courant si cela s'avère nécessaire. Avancer, encore et encore. Pour finir par couler, comme tout le monde, au fond de cette mer où une montagne de cadavres nous attend paisiblement, tendant leurs mains décharnées vers nous, invitation morbide pour la dernière danse. Je continue, quelque part au fond de moi, à avoir hâte d'y être, tout en gardant cela tout au fond de moi. Mais après tout, j'ai toujours adoré la musique...

Publié dans Blues d'une Fillette

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