Le vide

Publié le par Lolou

Je me demande ce que je fous là. J'ai l'impression que je ne devrais pas être ici. Sur cette chaise, dans cette maison, dans ce corps. J'ai l'impression d'être destinée à tout sauf à ça, que je ne suis née que pour que ça finisse. Le sentiment d'approcher de la fin. J'ai mal. C'est comme si tous ceux qui m'entouraient n'étaient que des corps à part, loin de moi, comme si je regardais la vie d'une autre, de celle que j'aurais dû être. Je ne suis pas comme l'héroïne de cette BD, la fin d'un tome ne m'apporte jamais la réponse. J'avance, je me force à sourire et à dire que tout va et ira bien. Au fond ce n'est pas faux. Rien ne va mal, rien sauf cette partie de ma tête gengrainée depuis des années, sauf cet estomac qui se resserre au fil du temps. Bizarrement je ne suis pas devenue addict à la clope, parce qu'au fond ça ne change rien. La fumée ne peut pas remplacer le moi qui manque. Je ne suis qu'une enveloppe. Même pas un robot car les machines sont logiques et ne connaissent pas le mal de vivre. Quelle belle expression, il faudrait que je cherche d'où elle vient. Après tout, il est un de mes plus fidèles compagnons depuis bien longtemps. Je ne sais pas si ça passera. Je ne sais pas si j'ai envie que ça passe. C'est douloureux, c'est épuisant, ça me donne envie d'abandonner complètement, mais j'ignore si je serai capable de vivre sans cette douleur permanente qui m'accompagne. Cette sensation de vide, de détachement. J'en ai assez de ressasser les mêmes choses, sans y trouver ni solution ni réconfort. Je me demande où tout cela me mènera. Je suis épuisée... Au fond de moi, l'humaine crie qu'elle n'en peut plus, qu'elle ne veut plus de tout ça, qu'elle veut être égoïste se moquer de tout et laisser tomber. Mais l'inhumaine est là aussi, c'est elle qui marche, qui sourie, qui note, qui travaille, qui souffre aussi. Dans le vocabulaire, être inhumain a une connotation très négative. Mais pour moi, cette partie inhumaine est ma seule chance d'être en vie. Si j'étais restée complètement humaine, il y a bien longtemps que je ne serai plus là. En fait je ne sais même pas pourquoi j'écris tout ça. Peut-être que ça me maintient un peu en vie, que ça permet à l'humaine de s'exprimer. Peut-être que j'attends un secours miraculeux, un admirateur secret, qui devinerait d'un coup tout ce que j'ai envie d'entendre, toutes les raisons pour lesquelles je souffre et que j'ignore moi-même, et qui me délivrerait de ce mal qui me ronge. Ou peut-être que j'attends seulement que tous mes amis tombent dessus, voient ma folie et me réconfortent ou m'abandonnent, dans un but purement égocentrique. Le fait de détestere attirer l'attention n'est pas un hasard. En fait, au fond de moi, j'y aspire tant que je me paralyse et me rends malade lorsque ça arrive. A chaque soirée, à chaque sortie, à chaque discussion avec quelqu'un, j'ai l'impression que chaque mot n'est fait que pour ça. En fait, je crois que je ne me comprends pas du tout. A tel point que je me suis abandonnée et que j'ai cherché à changer à tout prix. A tel point que je me suis oubliée, reléguée au fond, tout au fond, et que j'ignore les cris et les coups portés à cette porte blindée fermée à clef. Je ne sais pas ce que je cherche. Je ne sais pas si je le trouverais. Je ne sais pas si tout ça va continuer longtemps. Je ne sais pas comment tout ça va finir. J'ai mal de cette vie si parfaite, mal d'être ce que je suis, mal de ne pas être ce que je voudrais et devrais, mal de moi, mal de ce monde, mal de ces autres qui vont si bien et si mal, mal de tout, mal de rien. Je ne sais plus vraiment quoi faire... En fait je ne sais plus du tout, je ne sais plus rien. Je me laisse porter, je sors pour oublier, je souris pour me cacher, je fais semblant de travailler pour paraître. Mais j'échoue, je vais vers un échec de plus en plus grand. J'avance vers un énorme trou noir qui englobe tout. J'ai peur, j'ai mal, mais je ne peux parler de rien car je ne sais pas de quoi cette peur et ce mal sont faits. J'écris, pour dire que finalement je ne sais rien et ne peux rien dire, et ces mots sont vides, complètement vides. Un texte inutile, aussi inutile que moi en ce moment, aussi inutile que ce blog, que ces écrits, que mes paroles. Je ne suis qu'un immense vide qui cherche à se cacher dans des vêtements amples en essayant de se stabiliser, de ne pas tomber, car le vide ne se relève pas.

Publié dans Blues d'une Fillette

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